SUJET : Éthiopie, une autre Afrique de l'Est

Nous effectuons un court trajet dans le 4x4 avant de nous mettre en ordre de marche derrière le fringant Abdela. Ordre de marche, plutôt ordre de course, ABdela trotte comme un cabri, nonobstant les 3200 m d'altitude. Et moi, nonobstant à cause de mes 30 kg superflus, je souffle comme un phoque (mon totem chez les scouts, quelle coïncidence). Nous sommes dans la Web Valley, vallonnée comme pas une, nyala et chevaux regardent passer notre hétéroclite assemblée, Abdela devant, Catherine juste derrière lui et votre serviteur loin derrière, crachant ses poumons et des invectives contre le sadique meneur, la montagne trop haute, sa résistance trop basse, les piafous trop loin, les montées trop près, vous avez compris tout y passe...

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Abdela devant



Moi derrière

Catherine a même du mal à freiner notre effréné Abdela un instant, juste le temps de photographier quelques piafous qu'il ignorerait volontiers dans sa course. Des serins d'abord

302-303 Serin à calotte jaune, Serinus flavivertex, Yellow-crowned Canary





et un autre serin, celui d'Abyssine déjà vu à Debré Libanos

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Nous trottons (enfin, ils trottent) à travers les genévriers.



Abdela, malin, a compris qu'il valait mieux me soulager d'une partie de ma charge que me porter (à défaut de pouvoir faire plusieurs voyages) et m'a soulagé du 800 mm

Nous arrivons enfin à destination. Car oui; il y a une destination, j'aurais pu le deviner, notre course s'apparentait assez peu à une billebaude. Là, dans la falaise, Abdela nous signale un... Je ne vois pas quoi... Catherine, plus vive, a décelé dans la falaise grise qui nous fait face l'objet de notre attention

305-306-307 Grand-duc du Cap, Bubo capensis, Cape Eagle-Owl

Manifestement, Abdela avait une "date" avec notre noble rapace, il connaissait ses habitudes diurnes, savait exactement où le trouver... Après quelques photos, notre cicérone repart
à un train d'enfer (ma version)
à allure soutenue (mais soutenable - version de ma blonde)
à petite vitesse (freiné par un poids mort - sa version). Nous allons même tellement vite que nous butons presque dans un nyala tout surpris de se retrouvez nez à nez avec mon bazooka

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Ah, la raison sans doute de cette hâte, nous a conduit à un autre rapace, qui n'attend plus que quelques dizaines de minutes pour lancer sa nocturne activité...

309 Chouette africaine, Strix woodfordii, African Wood Owl


Il est temps de gagner notre hôtel à Goba, nous avons 44 km à faire, même si à vol d'oiseau il y a moins de 15 km...


Nous payons donc à Abdela les 600 birrs convenus plus les 100 birrs de pourboire qu'il nous a réclamés. Nous convenons d'un rendez-vous pour le surlendemain matin...

Nous sommes au Wabe Shebele Goba Hotel de réputation médiocre. Un petit pincement au cœur, la réservation a été très tardivement faite par Ermias, il y a deux jours à peine... Et si ? Il n'y a personne à la réception... Ça commence bien.



Je me cale dans un fauteuil, sous une affiche de mon Graal ornithologique, un bon présage ? Le Wi-FI ne marche pas, électricité ou non (plusieurs petites pannes intermittentes pendant notre attente), mais l'électricité, quand elle est là, alimente plusieurs grands écrans plats dans les salons de réception de l'hôtel qui retransmettent des programmes TV éthiopiens ou des documentaires. Ah mais, un employé, enfin... Habtamu commence à dialoguer, ça paraît long. S'il le faut, je passerai la nuit dans mon fauteuil !


et je suis surpris quand finalement il apparaît que nous avons bien une chambre pour la nuit, enfin, les deux nuits qui viennent ! D'ailleurs un employé nous y accompagne, la Kalashnikov en bandoulière, avis aux mauvais payeurs !


La chambre est correcte, la salle d'eau mériterait bien un petit coup de peinture, mais il y a de l'eau chaude (ça oui, un filet brûlant, et il n'y a pas d'eau froide...), il manque juste une serviette de toilette. Nous allons manger dans la salle de restaurant, impersonnelle au possible, et dans le noir, panne d'électricité.Catherine met sa frontale, hakuna matata...


Soupe et spaghetti bolognese (deux immenses plâtrées) et hop, à la réception pour l'affaire de la serviette de toilette qui manque à la chambre 27... Personne, Catherine farfouille, trouve un salon où un bon peu d'employés regarde la télé, en désigne un comme volontaire pour procurer la serviette de toilette qui manque à la chambre 27, il comprend l'anglais, chic, elle lui explique donc le manque de serviette de toilette à la chambre 27, il va au local ad hoc où il se munit d'une serviette de toilette afin de remédier à l'absence de la serviette de toilette de la chambre 27, et il se dirige allègrement, suivi de Catherine, à la chambre xx (je ne me rappelle plus le numéro exact), il y prend sous les yeux ébahis de Catherine une serviette de toilette, la lui tend, à charge pour elle de la convoyer à la chambre 27 quand son état de stupéfaction et de sidération se sera dissipé. Et bien sûr, il la remplace par la serviette de toilette qu'il a apportée à cet effet (euh...).
Mystères de l'Afrique ! Ou logique floue non compréhensible par les occidentaux à la pensée cartésienne et bêtement binaire ? Bon, hakuna matata !

Randonnée à vive allure mais quel résultat !! Deux superbes rapaces nocturnes, la chouette est extra

On en badine pas avec la sécurité dans l’hôtel

Très beaux les deux strigidés, il fallait les repérer, avec ce camouflage Jamais vu la chouette pour ma part.

Pour les Nyalas, s'ils n'ont pas de prédateurs et ne sont pas chassés, sait-on pourquoi il n'y a plus que 1.500 individus ? A cause de la destruction de leur habitat ?

Je suis impatient, il faut s'attendre à un Loup ou à un Bec-en-sabot, ou aux deux ?

Quelle horreur la billebaude à 100 à l'heure même si le résultat était au rendez-vous.Tu as toujours l'impression de manquer une observation
J'adore la tête de Catherine pendant l'attente de la chambre et encore plus celle de Bernard dans le fauteuil qui semble ne plus savoir ou il habite
En tout cas vous n'étiez pas seul dans la magnifique salle de restaurant ....

Dietmar

Je suis impatient, il faut s'attendre à un Loup ou à un Bec-en-sabot, ou aux deux

Ou bien un bec en sabot sur le dos d'un loup Ok je sors

Romain, l'hôtel est un hôtel d'état, ce qui explique sans doute la présence du militaire (car c'est un militaire, ce groom). À Awash, il y avait aussi des militaires avec kalash qui discutaient le bout de gras assis devant la réception. Pour autant nous nous nous sommes toujours sentis en sécurité (faussement ?).

Dietmar, pour le Shoebill, je ferai mon possible, mais ce n'est pas gagné, on commencera plutôt par le loulou d'Abyssinie, avec un peu de chance ...

Pour le faible nombre de nyalas de montagne, 2500 pour les plus optimistes, beaucoup moins pour d'autres (plus réalistes ?), je pense que c'est dû à la limitation toujours plus grande de leur territoire, ils ne vivent qu'en haute altitude mais même là, hors des parcs nationaux, les cultures et l'élevage sont en pleine expansion, les routes et la circulation croissante causent des accidents, et ils souffrent aussi de la chasse "légale", notamment pour les trophées, et le braconnage. Ils sont en principe protégés mais la protection effective se limiterait à Bale à 20 km² d'après l'IUCN.

Patrice, oui, une horreur cette course de montagne au butin si limité, il y avait certainement plus à voir.

Après une nuit troublée pour Catherine car "les religieux ont hurlé toute la nuit" mais paisible pour moi qui n'ai pas bénéficié de leurs chants sans doute mélodieux mais odieux pour elle, nous nous satisfaisons d'un petit-déjeuner médiocre, rien de mangeable mais café correct (manquerait plus que ça !). Il fait assez beau à notre sortie du Wabe Shebelle Hotel

Nous gagnons l'entrée du parc national par une route en travaux qui monte hardiment, aujourd'hui nous devons le traverser sur un itinéraire du nord-est au sud-ouest, sur le plateau Sanetti...


Ça y est, voici l'entrée dans le parc national :


Et déjà un abyssin loulou, certes en bois, mais quel bon présage...

Nous continuons à monter allègrement (enfin, c'est le 4x4 qui fait le job, et bien. Une voiture "normale" ne passerait pas sur cette piste très pentue, caillouteuse et/ou riche en chausse-trapes) et nous flirtons avec les 3500 m, le paysage commence à prendre une allure caractéristique, avec une végétation basse où se détache notre première lobélie géante (Lobelia rhynchopetalum, Giant Lobelia)





Nous sommes derrière une voiture qui semble peiner à monter, un 4x4 pourtant (la piste est interdite aux non 4x4), elle s'arrête d'ailleurs au bord de la piste, non, ce n'est pas une panne ou une pause, pas plus un arrêt pipi ! Nous crions stop, moi d'abord puis Catherine, mais Habdamu a déjà doublé le 4x4. Catherine doit se retourner pour essayer de tirer le portrait de notre premier piafou, cela ne suffit pas, et finalement elle doit descendre de la voiture. Heureusement notre petit ami est très complaisant, ce qui n'est pourtant pas une caractéristique de sa famille, et de plus c'est un jeune...

310-311-312 Râle de Rouget, Rougetius rougetii, Rouget's Rail endémique, statut NT

Comme vous avez pu le voir, le temps s'est dégradé, et plus nous montons, plus nous entrons dans les nuages... Le paysage est monotone, végétation rase, quelques mini lacs de montagne. Et pour la faune, un désert...





Mais soudain tout s'éclaire (c'est une figure de style) :

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Là, au loin et dans le brouillard le plus épais, certes, mais c'en est un, notre premier ! Ah, vous n'avez pas très bien vu, bon, Lightroom est notre ami, la fonction "Correction du voile" n'est pas faite pour les chiens, s'pas ?

314 Loup d'Abyssinie, Canis simensis, Ethiopian Wolf endémique statut IUCN EN (Endangered)



C'est étonnant ce à quoi peut conduire un simple traitement Lightroom (correction du voile, exposition, lissage de la luminance, contraste et saturation). Notre biquet a malheureusement des soucis bien plus sérieux que le brouillard. Aux dangers qui menacent le Nyala de montagne, extension de la population, diminution du biotope peuvent s'ajouter les maladies transmises par les chiens, Maladie de Carré, rage.Des populations ont déjà complètement disparu à certains endroits en Éthiopie (en rouge sur la carte), seuls les individus dans les parcs (Bale et Simien) sont vraiment protégées.

Bon, vous vous posez bien sûr la question : en ont-ils vu ? Et vous me connaissez, ce n'est pas mon genre d'entretenir à dessein le suspense, de vous faire vous ronger de curiosité, de vous faire mijoter dans l'interrogation, la réponse, elle est claire et nette, sans détour, c'est non ! Non, nous n'avons pas vu dans le parc national des montagnes de Bale de bec-en-sabot ! Étonnant mais possible, me direz-vous. Possible et étonnant, nous ne verrons pas d'autre loup d'Abyssine que notre copain de 9 H 16... Une prochaine fois, Inch'Allah !

Bon, une vieille connaissance pour nous rasséréner, un traquet bien sûr, afro-alpin bien sûr-bis !

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Autre vieille connaissance, hélas pas de bon augure pour notre quête lupo-abyssinienne, une buse augure bicolore :

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Ah, quand même une nouvelle tête !

318 Vanneau d'Abyssinie, Vanellus melanocephalus, Spot-breasted Lapwing endémique

Nous continuons à travers les lobélies géantes





jusqu'au prochain traquet. afroalpin, what else ?

318bis